Interview de Guillaume Allilaire – Gagnant du concours de nouvelles MACIF

Publié le par chez APACOM. Modifié le

Et si, en 2050, nous n’avions plus le choix que de cohabiter ?

Dans sa nouvelle Pour  toi(t) – Cohabiter en 2050, le planneur stratégique Guillaume Allilaire imagine un futur où notre rapport au logement bascule. Une fiction qui interroge, avec sensibilité et tension, ce qu’il adviendrait si notre refuge intime devenait un espace imposé de partage. Nourrie par sa connaissance des signaux faibles, son regard stratégique et ses engagements professionnels, cette nouvelle soulève une question centrale : comment cohabiter demain, autrement et durablement ?

Au fil du récit, transparaît une double réflexion : celle sur la juste reconnaissance de l’utilité sociale, et celle, plus humaniste, d’une solidarité qui s’invente malgré les différences. Un récit de fiction, oui, mais aussi une invitation à repenser nos récits collectifs — et le rôle que peuvent jouer les communicants dans leur transformation.

Pour toi(t) – Cohabiter en 2050 – Guillaume Allilaire

Qu’est-ce qui vous a inspiré pour écrire cette nouvelle, « Pour toi(t )– Cohabiter en 2050 » ?

Je me suis posé la question de quoi raconter autour des nouvelles façons de cohabiter demain. Quand on se demande ce qui va changer, la première idée qui m’est venue était de mettre en scène de nouvelles formes d’habitat, en m’appuyant sur les lieux « hybrides » existants comme les tiers lieux, le co-living, les habitats partagés, les phalanstères, les micro-communautés autonomes… 
Mais, ça aurait été trop descriptif à mon goût et pas assez incarné. J’avais besoin d’un fil narratif plus émotionnel. 
Or, en tant que planneur stratégique, par les études, les signaux faibles, les données existantes que je traite pour mon travail, je sais que le lien entre les Français et leur logement n’a jamais été aussi fort : un habitat cocon, où l’on se réfugie pour se mettre à l’abri du monde et reprendre contrôle sur tout ce qui nous entoure.
 
C’était mon point de départ. Pour y ajouter de la tension et donc des péripéties dans le fil narratif, je me suis demandé ce que cela ferait si ce refuge volait en éclat par une cohabitation forcée, quelle situation cela pourrait créer si l’on imposait d’avoir des inconnus chez soi, dans la part la plus forte de notre intimité. De ce fil est née la nouvelle.

Quel message souhaitez-vous transmettre à travers cette fiction sur la cohabitation et l’habitat de demain ?

Je dirai qu’il y a un double message (même si soyons honnêtes, je les analyse après coup, en relisant la nouvelle. Je n’avais pas du tout conçu le texte en pensant véhiculer ces thématiques) : 
– il y a d’abord un message sur « comment récompenser l’utilité sociale ? ». Notre système de valeurs montre des signes d’essoufflement. L’accélération du capitalisme (ultra capitalisme diraient certains) qui se heurte à la réalité du réchauffement climatique et de l’épuisement des ressources va forcément amener un changement radical, tôt ou tard, volontaire ou contraint. Il va donc falloir revoir tout notre système de valeurs et se demander comment on peut être plus juste sur la « richesse sociale » amenée par certain.e.s.
– et il y a aussi un message d’humanisme que je trouve positif : nos différences de parcours, de classes sociales, de lieux de vie s’effacent devant les rapports humains. On peut être sur le papier opposés en tout et en fait devenir indispensables l’un à l’autre. Le quotidien révèle l’humanité de chacun, au-delà des différences. Peut-être un peu idéaliste, voire naïf, mais je me dis qu’à l’heure actuelle, un peu d’optimisme nous fait du bien.

En quoi cette thématique fait-elle écho à vos valeurs personnelles et professionnelles, notamment en lien avec la RSE ?

Les marques ont un rôle primordiale à jouer pour faire évoluer la vision de la société. On ne change pas de système de valeurs si on ne change pas notre rapport à la consommation. 
Une partie de mon travail est de faire comprendre cela aux marques et mettre en place un positionnement et une stratégie qui va leur permettre d’évoluer voire de jouer un rôle de leader dans leur domaine et de créer le changement. 
On voit trop de marques qui ont des difficultés commerciales aujourd’hui car elles se sont reposées sur leurs succès pendant des années sans anticiper les nouvelles attentes des consommateurs et les nouvelles contraintes exogènes et endogènes (le recrutement des talents et donc la question de la marque employeur par exemple). 
 
Je pense également que nous avons notre part en tant que professionnels de la communication pour faire évoluer le système. Pour ma part, je suis adhérent au sein de CODE (Communication et Démocratie), une association qui travaille à mettre en place des pratiques plus vertueuses dans notre secteur, en sensibilisant les professionnels sur l’importance des impacts de leur métier, en encadrant certaines pratiques ou discours ou en mettant en place des mécanismes incitatifs pour la communication des produits les plus vertueux par exemple. 

Selon vous, quel rôle les communicants peuvent-ils jouer dans la sensibilisation aux enjeux de transition écologique et solidaire ?

La communication est le bout de la pelote. Il faut faire prendre conscience aux marques que l’on ne peut pas juste changer le vernis : il faut remonter le fil pour revoir les messages, donc a minima la stratégie marketing. Mais aussi bien souvent la stratégie commerciale, les gammes de produits, voire la feuille de route stratégique. 
Les communicants ont cette force d’être au plus près des avis clients, ont la connaissance des attentes de chaque cible, connaissent les leviers pour que les clients s’engagent pour une marque. C’est cette force là qu’il faut mettre au service d’un changement de modèle plus profond. 
La RSE n’est pas un poste de dépense. C’est un poste d’investissement. Toutes les entreprises doivent le comprendre : les années qui viennent seront vues sous le prisme de la durabilité ou nous devrons gérer le chaos. Ce qui leur coutera in fine beaucoup plus cher.
Bien entendu, c’est plus facile à dire qu’à faire et je me heurte moi aussi tous les jours à des entreprises qui ont besoin d’une efficacité très court terme pour atteindre leurs objectifs business annuels voire trimestriels, ou tout simplement être rentables. Mais il faut quand même que l’on plante la graine à chaque fois, dans tous nos domaines, pour faire évoluer les récits, et donc les imaginaires.
 
 
Propos recueillis par Philippine de Saint Sernin

Partagez cet article !

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.

Vous aimerez aussi

Estelle Gentilleau, nouvelle présidente de l’APACOM : un mandat tourné vers l’engagement et la transition

L’APACOM ouvre une nouvelle page de son histoire avec l’élection d’Estelle Gentilleau à sa présidence. [...]

Lire la suite

TOUR D’HORIZON DES NOUVEAUX ADHÉRENTS : QUENTIN BARJON

Passionné par les mots et les idées, Quentin a toujours vu la communication comme une [...]

Lire la suite

Le Salon Profession’L 2025 : deux jours pour oser, se réinventer et avancer

Les 27 et 28 mars 2025, l’Hôtel de Ville de Bordeaux a accueilli la 13ᵉ [...]

Lire la suite