Céline Réveillac, administratrice de l’APACOM et responsable de la commission Com Avenir, réagit à un article du Monde et à une certaine vision de la communication qui s’y révèle incidemment… Un billet d’humeur qui redonne du sens.
Ce mois-ci, Le Monde a publié le témoignage d’une jeune fille travaillant dans une agence de communication, tiraillée entre ses engagements et son quotidien dans son entreprise.
Flora, conceptrice-rédactrice, a longtemps été fière de son job dans lequel elle s’épanouissait. Puis un beau jour, à 30 ans, elle ne trouve plus de sens à ce qu’elle fait, à ce qu’elle créé. Elle est paumée. Comme tant d’autres, dans la pub ou ailleurs.
Flora, en qui beaucoup de gens pourraient se retrouver (toi, peut-être ?), a cherché des solutions qui lui permettraient de lier créativité et humanité. Et a balayé d’un revers de la main l’idée de travailler pour une ONG, ou un annonceur qui aurait des valeurs compatibles avec les siennes.
« Faire de la pub, c’est bien quand il y a de l’argent. Et les gens qui veulent faire changer les choses, ils n’ont pas d’argent à investir dans la pub. »
Et bien non chère Flora. Enfin oui un peu, oui beaucoup, oui dans certains cas, oui selon ta définition de la publicité, déjà. Mais non quand même.
Non parce que la publicité ce n’est pas que du tournage de film publicitaire, de l’achat média, du sponsoring à 20K, de la stratégie à 300 K l’année.
Pourquoi la pub ça serait bien uniquement quand il y a de l’argent ?
La publicité c’est surtout de la réflexion, du dialogue et des échanges, de la compréhension du contexte, du public ou encore des parties prenantes, et puis de la priorisation. C’est aussi s’adapter. S’adapter à un budget, par exemple. T’as pas 10k pour ton action de com’ ? Revois ton plan en fonction de ton budget. Les actions ne seront pas les mêmes. Les canaux seront différents. Les prestataires aussi. Mais ton objectif n’est pas le même non plus, de toute façon.
Dans la communication utile, solidaire, éthique (appelle-là comme ça te plaît), tu es là pour faire adhérer, pour mobiliser. Pour faire changer un comportement, aussi. Mais cette fois il ne s’agit pas de comportement d’achat, il s’agit de comportement humain bien plus complexe, qui ne rentrera pas dans ta segmentation « Génération Z » et dans ton plan média Lagardère ou Facebook ads. D’ailleurs l’achat média ne pourra pas grand-chose pour toi, du moins pas dans les mêmes proportions, et pas de la même façon.
Alors c’est vrai, Flora, il n’y a pas d’argent pour ceux qui veulent changer le monde, ou en tout cas pas pour la com’ parce qu’ils préfèrent le mettre dans le changement et ils ont raison. Y a pas non plus un salaire de ouf, mais si t’as de la chance il peut être correct voire très correct.
Par contre tu auras entre tes mains un tas d’autres possibles pour atteindre tes objectifs, si tu acceptes de te mouiller un peu. Si tu acceptes de voir les choses autrement, de voir la com’ autrement, pas comme un truc qui doit faire rêver les gens. La com’ utile, elle doit répondre aux nouveaux enjeux de notre société, et notre société elle ne veut plus rêver.
Ainsi de nouveaux enjeux de com’ se profilent (et ils sont énormes). Des friches entières sont à explorer, des actions nouvelles sont à imaginer et à expérimenter. C’est ça la créativité.
Crédit photo : Photo by Claudio Schwarz | @purzlbaum on Unsplash
—-
Céline Réveillac